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"J’ai décidé d’être heureux parce que c’est bon pour la santé."

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Guérir les blessures du cœur: la voie royale du pardon



Auteur d’une vingtaine de livres, créateur de la Journée Internationale du Pardon et des Cercles de Pardon, Olivier Clerc a animé des ateliers sur le pardon durant dix ans dans une quinzaine de pays. Cette expérience l’a conduit à redéfinir ce que recouvre cette notion, pour en faciliter la mise en pratique. Découverte d’une véritable « médecine du cœur ».


Pardon… Peu de mots sont à la fois aussi chargés que celui-ci et aussi mal définis. Chez la majorité des gens, il y a fréquemment confusion entre pardonner, cautionner, excuser, se réconcilier, etc. Rien d’étonnant dès lors, à ce que la pratique du pardon reste très difficile pour beaucoup d’entre nous.


Face à ces difficultés, la tentation est grande de se débarrasser complètement de cette notion : le pardon serait obsolète, un truc culpabilisant des religions dont nous n’avons plus besoin aujourd’hui. Vraiment ? Je ne crois pas. Comme d’autres concepts, le pardon a plutôt besoin d’être revisité et redéfini, pour nous le réapproprier d’une

manière qui fasse sens aujourd’hui. C’est à cette tâche que je me suis attelé dans « Peut-on tout pardonner ? », paru en 2015, aujourd’hui réédité en poche.


Pardonner, c’est guérir

On peut redéfinir le pardon à l’aide d’une métaphore : le pardon, c’est la « guérison des blessures du cœur ». Guérir, voilà à quoi aspire chacun d’entre nous quand on a été blessé.


Diverses études menées par le Dr Fred Luskin, responsable du Stanford Forgiveness Project, soulignent que ne pas pardonner a d’importantes répercussions psychologiques, relationnelles et même physiques. Lorsqu’on garde rancune au lieu de par-donner – les mots sont éloquents ! – ce qui reste bloqué en nous nous intoxique : on est davantage sujet à des maux de tête, des maux de dos et d’estomac, à des ulcères, à la dépression, l’insomnie, etc. L’absence de pardon peut aussi réduire notre longévité de cinq à six ans.


Si pardonner c’est guérir, il en découle que le pardon est avant tout un cadeau qu’on se fait à soi-même : faire oeuvre de pardon, c’est arrêter de s’auto-intoxiquer avec le poison de la haine, du désespoir ou de la colère, c’est soigner ses plaies pour retrouver la liberté d’aimer. C’est revivre, tout simplement, au lieu d’être un mort-vivant.


Des obstacles à écarter

De nombreux amalgames, qui nous font associer au pardon des choses qui doivent en être clairement distinguées, rendent sa pratique difficile, voire impossible à beaucoup d’entre nous. Au fil des ans, j’en ai recensé une bonne quinzaine, qui sont comme autant de grosses pierres qui entravent la route du pardon. Redéfinir le pardon ne suffit donc pas : il faut également préciser ce qu’il n’est pas, afin de circonscrire beaucoup plus précisément ce que recouvre vraiment sa pratique. Voyons-en deux exemples.


  1. Pardonner n’est pas cautionner. Le pardon, c’est d’abord pour moi, pour guérir mon cœur. Mais je n’ai pas qu’un cœur: j’ai aussi une tête, un mental. Je peux réfléchir, faire preuve de discernement. Tout en guérissant mon cœur, je peux donc condamner fermement l’acte dont j’ai été victime, je peux même déposer plainte au commissariat. La grande différence, c’est que je le fais en ayant le cœur en paix. Au tribunal, j’irai chercher la justice et non la vengeance.

  2. Pardonner, ce n’est pas toujours se réconcilier. Pour se réconcilier, il faut être deux. Je peux faire la moitié du chemin, de mon côté. Je peux guérir, comprendre, avancer. Mais si l’autre ne fait pas sa moitié à lui, s’il ne reconnaît pas sa faute, s’il ne fait pas amende honorable, s’il ne cherche pas à réparer, la réconciliation est impossible ou, pire, elle n’est qu’une farce de mauvais goût, voire une mise en danger pour soi. Guérir ne dépend que de moi ; mais se réconcilier dépend aussi de l’autre. Rien ne nous oblige d’ailleurs à nous réconcilier avec quelqu’un : mais ce refus éclairé de réconciliation, s’il devait se justifier, n’empêche pas d’atteindre le pardon et la paix du cœur.


Deux distinctions essentielles

Une saine pratique du pardon exige deux distinctions cruciales. D’abord, je dois distinguer ce qui se passe dans mon cœur et dans ma tête. Pour mon cœur, je souhaite la guérison, quoi qu’il me soit arrivé, même de plus douloureux. Mais pour autant ma tête doit rester lucide : guérir oui ; cautionner, accepter ou excuser, non ; se réconcilier, à voir… ; etc. Le cœur et le mental doivent être autonomes. Il faut éviter à la fois un cœur qui pardonne mais nous rend stupides, et un mental très discriminant qui nous empêche de pardonner. Cette indépendance de l’intellect et de l’affectif est quelque chose à développer, qui nous rend beaucoup plus libres intérieurement.


Deuxième distinction : il y a ce que je fais pour moi-même et ce que je décide pour la personne qui a mal agi contre moi. Une fois que j’ai le cœur en paix, qu’est-il juste de faire par rapport à elle ? Là encore, l’un ne conditionne pas automatiquement l’autre. Je peux et pardonner (pour guérir mon cœur), et porter plainte (pour confronter l’autre aux conséquences de ses actes), si c’est cela qui est juste.


Ce double distinguo nous rend libres, à la fois intérieurement et extérieurement. Libres de guérir. Libres d’agir avec discernement.

Un chantier pour le 21e siècle

Au cours du siècle passé, la médecine physique a fait des progrès exceptionnels.


Une personne gravement accidentée peut retrouver son intégrité physique à la suite de plusieurs opérations. Mais dans le même temps, combien d’entre nous passent des années avec les mêmes plaies au cœur, les mêmes vieilles rancunes ? Ce sont ces maux-là qui entretiennent les violences qui s’étalent chaque jour dans les médias.


Situé entre la tête et les mains, le cœur conditionne étroitement nos pensées et nos actes. Guérir le cœur, par conséquent, c’est le moyen le plus sûr de changer notre manière de penser et d’agir.


Mettre en oeuvre le pardon, individuellement et collectivement, voilà sans doute le grand chantier qui nous attend, en ce 21e siècle, pour cheminer vers ce monde meilleur que beaucoup d’entre nous appellent de leurs vœux. Il ne suffit pas de soigner le corps. Il ne suffi t pas d’instruire les têtes. Il est impératif d’oeuvrer à cette guérison du cœur qui assure la fluidité de tout le système, en nous et autour de nous.











 

Pour aller plus loin :



Olivier Clerc est écrivain et formateur. Il est l'auteur de vingt-deux livres dont La grenouille qui ne savait pas qu’elle était cuite, Le Don du Pardon, et le best-seller pour enfants Tu es comme tu es. Il à l'origine des Cercles de Pardon, inspirés de sa rencontre avec don Miguel Ruiz en 1999, et le créateur de la Journée Internationale du Pardon, célébrée le 18 septembre.










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